Tarif sacrificiel de Marseille
Carthage, découvert à Marseille en 1845, IVe siècle av. J.-C. Calcaire, H. 42,5cm ; L. 59cm, inv. 83.1.7.142
Cette stèle découverte en 1845 lors des travaux d’aménagement de la nouvelle cathédrale de la Major (Sainte Marie Majeure), dans le quartier de la Joliette, provient vraisemblablement de Carthage (Tunisie) où elle devait être scellée dans le temple de Ba’ al-‘aphone. Sa présence dans la cité phocéenne s’explique probablement par son emploi comme pierre de lest par un navire venant de la cité phénico-punique qui l’aurait abandonnée sur place à une époque indéterminée.
Son inscription énumère, sur vingt et une lignes, les redevances versées aux prêtres pour chaque type de sacrifice en fonction de la nature des offrandes présentées à la divinité. Trois types de sacrifices y sont distingués : les kll et les ‘w’t, qui ne concernent exclusivement que le bétail, et les sacrifices slm kll, pour lesquels il est possible d’offrir divers types d’oiseaux ainsi que des offrandes de nourritures (prémices végétales, graisse, huile, gruau, lait). On ignore ce qui distingue ce type de sacrifice des deux autres.
Alors que la tradition littéraire unanime attribue la fondation de Marseille, vers 600 avant J.-C., à des Grecs venus de Phocée et que les premières découvertes effectuées dans la ville ne semblaient pas contredire cette tradition, une théorie selon laquelle Marseille aurait abrité une importante communauté – ou même que les Phéniciens s’y seraient installés avant les Grecs – se répandit à partir du milieu du XIXe siècle. Elle avait pour origine la mise au jour, dans le quartier de la Major, d’une inscription phénicienne connue aujourd’hui sous le nom de “tarif de Carthage” : le règlement religieux qu’elle transcrit parut apporter la preuve que des cultes phéniciens étaient pratiqués à Marseille. Même quand l’origine carthaginoise de la pierre sur laquelle est gravée l’inscription eut été démontrée, plusieurs savants firent crédit à cette théorie, principalement développée par l’abbé Bargès. Un article publié en 1876 dans un ouvrage destiné au grand public montre qu’elle s’était assez largement répandue : l’auteur, A. Saurel, va jusqu’à proposer un plan sur lequel la ville antique est partagée entre un quartier phénicien et un quartier grec. Rien dans les découvertes archéologiques récentes ne laisse penser qu’une communauté phénicienne ait jamais existé à Marseille.
© Musée d’Archéologie Méditerranéenne / David Giancatarina