Allégorie
1905-1906

Musée Cantini

André Derain, 1905-1906, gouache sur papier, 50 x 64,5 cm

Comme ses amis Matisse et Manguin, Derain exalte la ligne dans le thème des baigneuses et de la danse tout en renouvelant le thème arcadien de l'âge d'or par l'assimilation d'une symbolique issue de différentes cultures moyenâgeuse, primitive, hindoue, océanienne ou celte visible dans sa grande composition de La Danse (1906, Londres, Fridart Fondation) qui prend à contre-pied le Bonheur de vivre de Matisse.

Chez Derain, il ne s'agit pas seulement d'un accent idyllique du plaisir et du bonheur, s'y juxtapose une représentation mystérieuse et inquiétante des mondes infernaux et célestes, de l'enfer et du paradis. Dans notre dessin, l'arbre au centre de la composition semble symboliser le passage d'un monde à l'autre. Cette œuvre d'une grande fluidité est très novatrice dans le traitement des figures qui s'inscrivent dans ce paysage comme autant d'arabesques et illustrent sa vision poétique des mondes qui s'affrontent et s'unissent.

La figure est la préoccupation majeure de Derain en ces temps de ruptures. La ligne qui dessine les formes n'est pas fermée mais ouverte comme pour mieux symboliser la communion du règne humain, végétal et animal. Cette fusion exprime la métamorphose possible des figures, par « le fil secret qui les relie entre elles (1) ». Ce thème des baigneuses, de la danse, des personnages en lutte n'est pas sans rapport avec le renouveau de la poésie symbolique. Au même moment, Apollinaire publie L'Enchanteur pourrissant, récit en prose qui revisite la légende de Merlin et de la forêt primitive.

(1) André Lhote, Traités de la figure et du paysage, Grasset, Paris, p.43-44 et 62.

Acquisition avec l'aide du Fonds Régional d'acquisition des musées et du Fonds du patrimoine en 2003, musée Cantini, Marseille, Inv. C.03.12

Droits d'auteur : © ADAGP, Paris

© Ville de Marseille, Dist. RMN-Grand Palais / Benjamin Soligny / Raphaël Chipault